Le manque de transparence est depuis toujours un fléau de l’industrie publicitaire digitale. L’apparition du programmatique est venue empirer ce tableau. Comment vérifier des achats automatisés, enchaînés, qui finissent sur des milliers de sites, en passant par des dizaines d’intermédiaires ?
Comme l’avait dit Brian O’Kelley, fondateur d’AppNexus, lorsqu’il a coupé une part significative de son business (les sites qui utilisaient des bots pour gonfler leurs chiffres), “le succès requiert souvent plus de courage que d’intelligence”. De la part d’un des types les plus intelligents que j’ai croisés dans ma carrière, ça place la barre très haut !
Le marché va devoir faire preuve de courage et encourager la transparence. Comme l’écrit Paul Ripart de Prisma, “Le programmatique open [est] le seul média où la loi Sapin ne s’applique pas dans les faits”.
Il y a plusieurs raisons à cela :
- Toute chaîne complexe a des bugs. Les paramètres que les plateformes (adserver, header bidding, SSP1, SSP2…, DSP, re-SSP2, re-SSP1, re-header-bidding, et re-adserver) se passent entre elles, ces paramètres se perdent parfois.
- Certaines plateformes permettent de protéger l’anonymat des sites qui envoient leur inventaire
- Certains sites bloquent même les outils d’adverification pour qu’ils ne puissent pas remonter l’URL réelle
Les bugs, ça existe, il en restera toujours. La seule question à poser sur la perte d’informations dans la chaîne programmatique est la suivante : certaines négligences sont-elles volontaires ? J’ai déjà expliqué qu’il est plus facile de trouver un bug qui nous pénalise qu’un bug qui nous arrange. Dans ce contexte, je suppute que les pertes de données sont plus fréquentes qu’elles ne devraient…
Un site peut ne pas vouloir apparaître en clair dans les enchères publicitaires, et c’est défendable dans certains cas. Par exemple, si le site est vendu par différents canaux, et que les prix ne sont pas identiques. Une partie est vendue en direct par des commerciaux, une autre en enchères ouvertes (open auctions). Si les ventes aux enchères sont transparentes, l’acheteur dispose d’un argument pour négocier à la baisse les achats directs. Mais ce cas devrait rester rare…
Le troisième cas, où il n’est pas possible de récupérer l’URL de la page dans laquelle une publicité a été servie, ce cas relève pour moi de la fraude. En effet, les outils d’adverification ont maintenant les technologies suffisantes pour collecter l’URL. Elles n’y arrivent pas dans certaines configurations (iFrames cross-domain imbriquées), que l’on rencontre rarement dans la nature. Donc pour moi ces configurations sont présentes lorsque le site veut cacher quelque chose. Par exemple, que l’URL déclarée aux acheteurs n’est pas l’URL réelle. Et ça, ce n’est ni plus ni moins que de la fraude.
Du temps des data (j’en parle comme d’une époque révolue depuis longtemps ! ) on achetait des impressions publicitaires sur la base d’un cookie. Où la publicité s’affichait était secondaire. Avec les data, il n’était donc pas nécessaire de connaître la page où une publicité s’affiche. A l’exception de la brand safety, pas toujours utilisée sur les stratégies de performance.
Donc les data se font globalement accommodées d’un manque de transparence. Certains petits malins du marché en ont profité.
Lorsqu’on fait du ciblage contextuel, l’une des informations les plus pertinentes est l’URL de la page où la publicité va s’afficher.
Donc, inutile de faire un long tableau : si l’URL est masquée, il n’est pas possible de faire du ciblage contextuel.
En conclusion, le ciblage contextuel renforce la transparence du marché publicitaire digital ! Et quand on voit cette Vierge voilée, fascinant marbre de Giovanni Strazza, on ne peut que se dire : “c’est beau la transparence” !
