Selon plusieurs études (comme celle-ci qui date un peu ou avec simplement une pincée de bon sens), les internautes acceptent la publicité à une condition : ne pas se sentir traqués. Parfois même ils l’apprécient.
En fait, là où ça devient intéressant c’est que l’acceptabilité et le rejet semblent conditionnés par la même chose : le ciblage.
On accepte, voire on aime, les publicités qui nous intéressent. Certains sont aussi favorables à des publicités pour leurs marques préférées. Le ciblage est donc un attribut positif de la publicité.
Alors quel ciblage est massivement rejeté ?
A mon avis, c’est le ciblage qui se remarque.
Tant qu’on ne remarque pas le ciblage, on ne peut pas se sentir ciblé. Cela semble une évidence mais c’est un peu plus subtil que ça.
Je pense que tout le monde sait plus ou moins consciemment qu’on est ciblés. Ce n’est pas qu’on ne remarque pas certains ciblages, mais on préfère les ignorer.
D’une part parce qu’une publicité ciblée intelligemment est “globalement inoffensive”. Je ne suis pas choqué si je vois de la publicité pour des rasoirs sur un site de rugby. Il n’y a rien de méchant, tant que la pub n’affiche pas “Laurent, tu n’as pas changé tes lames depuis trois semaines”…

D’autre part, quand bien même on se douterait qu’une publicité est ciblée, on préfèrerait l’ignorer car elle correspond à un de ses centres d’intérêts.
Enfin, si on remarque que la publicité est ciblée, on se dit parfois que cela vaut mieux, car sinon, on aurait des pubs inintéressantes, voire dérangeantes.
Comment se fait-il donc qu’un même critère (le ciblage) crée à la fois de l’agrément et du rejet ?
Tout est dans la granularité du ciblage.
Le ciblage que l’on accepte, voire que l’on veut, est un ciblage macro. Un ciblage dans lequel des milliers, voire des millions d’autres personnes peuvent se reconnaître.
Le ciblage que l’on rejette, à l’inverse, est un micro-ciblage. Un ciblage qui ne concerne qu’une personne, soi-même.
Tout est donc une question de quantité. Par quantité j’entends la taille de la cible.
Une cible de une personne (moi) se repère facilement. Elle provoque une gêne, un énervement (surtout lorsqu’elle est répétée des dizaines de fois), et parfois un rejet.
Une cible de plusieurs millions sera peut-être moins pertinente qu’une cible de taille “un”. Mais elle sera mieux acceptée, et l’acceptation est un critère de pertinence en soi aussi.
Ou placer le curseur entre un et un million ? Il dépend certainement du secteur d’activité (la santé est beaucoup plus sensible que l’alimentation par exemple). Mais quel que soit le niveau où on place le curseur, le passage du micro-ciblage à un ciblage modéré est clé si on veut éviter de renforcer le rejet de la publicité.
Les data utilisateurs se sont tiré une balle dans le pied. Ils ont créé les conditions de leur rejet et de leur disparition partielle.
Avec des technologies de ciblage contextuel, sans data, statistiques, on évite le risque de rejet de la publicité. Est-ce à dire que sans data utilisateurs, le RGPD n’existerait pas, que les cookies tiers seraient toujours supportés par les navigateurs ? Cette question n’a pas vraiment de sens, le mal est fait.
Mais ce qui est sûr, c’est qu’à l’avenir, si on veut éviter d’alimenter le rejet de la publicité (avec les conséquences que l’on sait sur la presse notamment), des solutions respectueuses de la vie privé doivent être privilégiées.