La semaine dernière, alors que j’écrivais un article sur les cookies, Google a annoncé un nouveau projet de solution post-cookies : Dovekey (que l’on peut traduire par colombe).
La colombe de Google est issue du croisement de sa tourterelle avec le moineau de Criteo. Je ne me lancerai pas dans une analyse du patrimoine génétique de ces différents oiseaux, rassurez-vous !
Que peut-on dire des différentes tentatives de Google pour trouver une solution à la fin des cookies ? Une colombe symbolise-t-elle toujours bien la paix ?

Premièrement, utiliser des noms d’oiseaux, ça doit cacher quelque chose. 🙂 Lorsqu’on habille un projet de légèreté, c’est peut-être pour en masquer la lourdeur…
Les différentes solutions mettent en jeu un tiers de confiance, qui devra recevoir des données utilisateur, mais ne pourra pas les transmettre aux affreux espions de l’AdTech (les James Bond ou Jason Bourne de mon précédent article).
Quelles données seront envoyées (un identifiant unique généré par le navigateur ?), comment seront-elles conservées (dans une nomenclature prédéfinie), combien de temps (on lit ça et là 24 heures) ?
Autant de questions auxquelles le marché devra répondre.
Et qui sera ce tiers de confiance ? Je devrais tout de suite reformuler : qui seront ces tiers de confiance ?
Parce qu’il est certains qu’il n’y en aura pas qu’un seul. Il n’y a qu’à voir comme le marché n’a pas réussi à se mettre d’accord sur le consortium pour un identifiant universel. Ou combien de CMP (Consent Management Platforms) se sont créées pour « centraliser » le consentement des internautes au ciblage publicitaire.
Comme disait George Bernard Shaw, « Quand un homme et une femme sont mariés, ils ne font plus qu’un. La première difficulté consiste à savoir lequel ». Les grands acteurs parviendront-ils à se mettre d’accord pour laisser un tiers de confiance centraliser leurs données ?
Même si ce tiers de confiance est une structure à but non lucratif, financée par les AdTech, comme le consortium united id, il n’y aura certainement pas de consensus.
Deuxièmement, l’algorithme envisagé pour utiliser ce tiers de confiance. Je ne vais pas rentrer dans les détails (cet article du JDN le fait très bien), mais dites-vous juste que, si vous trouvez les protocole OpenRTB n’est pas assez compliqué pour vous, vous allez adorer ces oiseaux-là 😉 !
Ces protocoles seront-ils simplement viables ? Les contraintes des enchères en temps réel (300 milli-secondes) sont telles qu’un aller-retour supplémentaire va doubler les temps de réponse !
Bon, déjà l’option de demander à la tourterelle (le navigateur) de faire l’enchère a été vite abandonnée. Sur le réseau de l’internaute, un simple ping peut à lui seul consommer tout le temps imparti à la gestion de l’enchère.
Il reste encore du temps (18 mois environ avant que Chrome ne rejette les cookies tiers). D’autres oiseaux vont certainement s’ajouter. J’attends avec impatience un colibri de 10 tonnes qui mettra en jeu trois entités et quatre aller-retours entre le navigateur et les serveurs !
Google a dors et déjà prévenu que le délai de deux ans avant la suppression des cookies tiers de Chrome pourrait être prolongé si aucune solution technique de remplacement n’était trouvée.
Je répète ce que j’ai écrit précédemment : le cookie était une solution technique à tout faire. En en rejetant les dérives de certains usages (l’hyper-ciblage notamment), on oblige le marché à trouver plusieurs solutions pour plusieurs problèmes différents.
La précédente solution Sparrow (moineau) a été poussée par Criteo, le spécialiste de l’hyper-ciblage ! Moineau n’offrirait plus la granularité de ciblage que Criteo proposait, soit. Mais il peut sembler paradoxal que ce cas d’usage soit le premier traité. En fait, c’est logique. Qui d’autre que les grands acteurs du marché vont pouvoir investir les ressources suffisantes pour trouver la solution qui remplacera les cookies tiers ? Personne !
Et quid des autres cas d’usage prévus ? Quid du capping, besoin simple et fondamental de l’ensemble de la chaîne (annonceurs, sites et internautes) ? Personne n’a un intérêt vital à le défendre, comme Criteo doit défendre le ciblage. Donc personne ne travaillera sur ce cas d’usage, je le crains.
Que va-t-il se passer si les alternatives au cookies tiers mettent en jeu des usines à gaz ?
Comme toujours, seuls les gros les implémenteront.
Ou alors, aucune solution ne sera jugée viable, et on n’aura que deux choix :
- Aucune data
- Des data fondées sur des identifications lourdes (email, téléphone)
3 réflexions au sujet de « Colombe, tourterelle, moineau : jamais vu des oiseaux aussi lourds ! »