Avec Topics, Google ouvre grand la porte au contextuel

Google ne sait toujours pas comment sortir du piège de l’arrêt des cookies tiers.

Après une série de noms d’oiseaux (pas des insultes, des codes de projets), après FLoC, voici Topics.

Topics s’attèle à l’un des principaux reproches qui étaient faits à FLoC, à savoir la lisibilité des performances. FLoC créait des cohortes d’internautes qui avaient peu ou prou les mêmes comportement sur Internet.
L’acheteur était informé que la cohorte 1234 avait de meilleures performances que la cohorte 2345. 
Et alors ? disait l’acheteur, ça me fait une belle jambe ! C’est quoi 1234 ???

Topics remplace les cohortes anonymisées par des catégories IAB, déjà beaucoup plus lisibles.

Mais c’est là que la liste des limitations commence :

  • Les catégories sont créées par Chrome sur la base des URLs, et non des contenus. Quand on a accès au contenu de la page (on parle du navigateur qui affiche la page), c’est un choix très limitant, dicté par une volonté de ne pas accéder à des données personnelles. Tous les sites dont les URLs ne sont pas explicites (comme Dailymotion par exemple) ne sont donc pas éligibles.
  • Seules environ 300 des 800 catégories IAB sont conservées, de façon à ne pas avoir trop de détail. 
  • Chaque site n’est associé qu’à 15 catégories au maximum !
  • Pire, lorsqu’un outil de ciblage demande à Chrome sur quelles catégories la publicité est servie, seules 3 des 15 catégories sont remontées aléatoirement. Donc la couverture du ciblage est de facto divisée par 5 à un instant donné.

Lors de la présentation de Topics, j’étais comme tous les autres auditeurs, étonné par la pauvreté de cette proposition.

L’intervenant en était bien conscient. Au point qu’il a lâché cette phrase à plusieurs reprises :

« si Topics est trop limité, vous pouvez toujours faire du ciblage contextuel » !!!

Le marché adressable d’Implcit s’est d’un coup considérablement élargi !

En fait, Google s’est pris dans son propre siège, et ne sait pas comment en sortir.

D’un côté, on sent une peur justifiée à l’idée que l’on puisse accuser Google (ou Chrome) d’accéder à des informations personnelles, et à les utiliser sans le consentement des internautes. Ne pas regarder les contenus alors qu’ils sont à portée de main, c’est un choix radical. Pire, le premier métier de Google est de crawler les pages, et d’en analyser le contenu. Toute l’information se trouve sur les serveurs de Google !
Mais cela impliquerait un échange d’information entre Chrome et les serveurs, ce qui jetterait une suspicion légitime sur un éventuel traçage de l’activité.

De l’autre côté, quand on a 70% du marché des navigateurs, des SSP, des adservers, des DSP, des CMP, il est très facile de créer des synergies qui favorisent l’un ou l’autre de ses marchés. 
Inversement, il devient très difficile d’inventer un système qui présente un intérêt pour le marché, mais qui ne crée pas de synergie et qui ne renforce pas cette position dominante.

Certains, notamment en Allemagne, accusent Google de chercher à augmenter ses parts de marché en arrêtant les cookies tiers dans Chrome (et en favorisant ainsi ses cookies first). Il se peut même que ce soit une décision de justice qui empêcherait Chrome d’arrêter les cookies tiers !

Google se trouve donc dans une position très inconfortable, coincé entre trois écueils :

  • Ne pas récupérer d’informations personnelles
  • Ne pas augmenter ses parts de marché
  • Apporter de la valeur ajoutée au marché

La solution à ce dilemme (on peut inventer le terme “trilemme” quand un dilemme a trois côtés ? 😉) a peut-être été énoncée lors de la présentation de Topics : permettre au marché d’apporter des solutions efficaces de ciblage contextuel.

Le contextuel ne demande en effet pas de consentement, car aucune donnée personnelle n’est en jeu.
Google pourrait s’ouvrir à des solutions qui apporteraient de la pluralité, au lieu de chercher à tout faire eux-mêmes.
Et la notion de valeur ajoutée de ces solutions viendrait justement de leur neutralité. 

Ce trilemme a une solution : elle s’appelle le pluralisme.

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